Les strongles gastro-intestinaux sont des vers ronds présents dans le tube digestif de tous les bovins ayant accès au pâturage : dès lors que les bovins pâturent, ils sont infestés. Ces parasites peuvent être responsables de troubles digestifs, d’immuno-dépression et de baisse de croissance chez les jeunes, et parfois de diminution de la production laitière chez les vaches adultes.
Les espèces de strongles colonisent différentes zones du tractus digestif. Ostertagia et Trichostongylus se logentdans la caillette, Cooperia et Nematodirus dans l’intestin grêle et Oesophagostonum dans le gros intestin Ostertagia et Cooperia sont les plus fréquents.
Ostertagia est le plus pathogène.
Cycle parasitaire
Le cycle des strongles comprend une phase libre et une phase endogène.
Phase libre : Sur la pâture, si les conditions sont favorables, les œufs excrétés dans les matières fécales des bovins infestés éclosent rapidement. Il libère une larve L1 qui évolue en L2 puis en L3, seul stade larvaire infestant. La durée du cycle peut varier d’1 semaine à 6 mois. Les facteurs météorologiques entraînent une dynamique saisonnière des larves infestantes sur le pâturage avec deux périodes à haut risque : au printemps – début été et en automne.
La température et l’humidité ont un impact fort sur le niveau de contamination des parcelles par les larves infestantes de strongles digestifs. La température régule la vitesse de développement de l’œuf à la larve infestante. Dans les conditions environnementales optimales avec des températures de 22°C à 26°C, la durée d’évolution est d’environ une semaine.
L’humidité assure la survie des larves et conditionne leur migration depuis les bouses vers l’herbe ingérée par les bovins.
Paradoxalement, les périodes de sécheresse estivale sont les plus dangereuses car les œufs, qui continuent d’être pondus, s’accumulent et poursuivent leur évolution, protégés sous les croûtes des bouses. Les larves sont libérées après les pluies orageuses qui délitent les bouses et sont à l’origine d’un pic d’infestation des pâtures en fin d’été. Les génisses s’infestent alors massivement et peuvent être gravement pénalisées jusqu’à leur rentrée à l’étable.
Un hiver froid et rigoureux va limiter la contamination résiduelle des pâtures. Sous nos latitudes, le climat océanique doux et humide favorise davantage la persistance du parasite. Les œufs et les larves L3 peuvent survivre. Les œufs reprendront alors leur développement au printemps suivant.
Phase endogène : Les larves L3 ingérées par le bovin évoluent très rapidement en L4, L5 et en vers adultes qui vont ensuite pondre des œufs dans les matières fécales. Lors de la primo-infestation, la durée du cycle endogène est d’environ 3 semaines. La durée et l’évolution de cette phase dépendent de la réaction immunitaire de l’hôte.
Par de multiples stratégies, Ostertagia retarde le développement de l’immunité. Le stade adulte est reconnu en quelques semaines par la réaction immunitaire. Il s’ensuit une réduction de la taille des parasites, une baisse de la ponte et, enfin, leur expulsion. En revanche, il faudra environ 8 mois de contact régulier et notable pour que l’animal interdise l’implantation des L3 dans la caillette. Après 34 semaines de contact réel avec le parasite, l’immunité est acquise et elle permettra aux animaux adultes de résister à la pression parasitaire.
Gestion du parasitisme
A la mise à l’herbe, le recyclage des strongles digestifs est assuré par les jeunes bovins, vierges de toute immunité. Ils ingèrent les larves infestantes (L3) de l’année précédente qui ont survécu à l’hiver et celles issues des œufs fraîchement éclos. Elles sont peu nombreuses et fragiles mais évoluent en vers adultes très prolifiques.
Trois semaines plus tard, les vers, devenus adultes, pondent des œufs se retrouvant dans les bouses sur les prairies. Ce processus donnera naissance à une nouvelle génération de strongles. Le cycle va ainsi se perpétuer tout au long de la saison et sera responsable du pic de contamination des prairies au cours de l’été. L’infestation des jeunes bovins progresse au cours des mois avec apparition de répercussions zootechniques. La diminution de la hauteur de l’herbe sur les prairies et l’augmentation des besoins des animaux entraînent une augmentation de l’infestation jusqu’à la rentrée en étable. Les symptômes cliniques peuvent apparaître : poil « piqué », diminution du GMQ, voire amaigrissement, diarrhée profuse, exceptionnellement mortalité.
Les animaux destinés à une carrière de reproducteur doivent rencontrer le parasite et apprendre à le reconnaître. Le contact doit être répété et en petite quantité, sans jamais pénaliser la croissance. La maîtrise du parasitisme est la recherche du bon compromis entre croissance et acquisition de l’immunité.
La conduite au pâturage et l’utilisation raisonnée des vermifuges permet de contrôler les infestations.
La durée du pâturage, sur une parcelle unique ou en rotation, la complémentation et le chargement à l’hectare influent largement sur la rapidité et l’intensité du recyclage parasitaire. En fonction de ces critères et des conditions météorologiques, le pic d’infestation des prairies variera dans son amplitude et dans sa date d’avènement.
En prenant en compte ces différents éléments, on détermine « quand traiter ». Ceci évite un usage excessif de vermifuges favorable à l’apparition de résistances chez les parasites. L’administration du vermifuge est raisonnée en ciblant les périodes à risque. L’efficacité est optimisée avec un coût maîtrisé.
Gestion du parasitisme en élevage allaitant
L’approche du risque parasitaire diffère en élevage allaitant. Le mélange des générations modifie le risque d’infestation. Les vaches adultes immunisées recyclent peu et servent « d’aspirateur » à strongles, même si les veaux recyclant des parasites, exposent davantage les mères à la pression parasitaire.
Les veaux allaitants sont protégés lors de la première année de pâturage en raison de l’alimentation lactée prolongée et une consommation d’herbe plus réduite ; bien qu’il faille faire une distinction entre les veaux d’hiver et ceux nés au printemps. Les uns s’infesteront plus tôt que les autres sevrés en fin de saison de pâture.
Diagnostic
Le dosage de pepsinogène est un bon indicateur de la maîtrise de l’infestation par les strongles digestifs. Il existe, en effet, une corrélation entre le taux de pepsinogène sérique et les lésions de la caillette pour les bovins de 1ère année en élevage laitier et de 1ère et 2ème année en élevage allaitant.
En fin de saison de pâturage, des prélèvements sanguins sur cinq animaux d’un même lot (homogène en âge, historique de pâturage, de traitement, etc), permet d’évaluer la charge parasitaire. En réalisant la moyenne des cinq dosages, il est possible de mesurer l’efficacité des mesures antiparasitaires et de décider de l’éventualité d’un traitement de rentrée.
Pascal LE BUEGUEC GDS 53